dimanche 29 novembre 2009

L'univers d'Hors Là Monde...

Rencontre au café de Flore avec la fondatrice de la marque Hors Là Monde, Symine Salimpour, dont les parfums et les bijoux se veulent l'expression d’un ailleurs où temps et différences s’arrêtent.


Hors Là Monde propose actuellement deux parfums, Shiloh et Lady Shiloh, (aux influences orientales chères à leur créatrice), que l'on peut actuellement découvrir aux Galeries Lafayette Boulevard Haussman. C'est ainsi que j'avais rencontré Symine cet été, et j'avais été séduite par sa démarche, celle d’exprimer un univers par la création de parfums. Cette volonté, qui passe également par celle d'être une jeune chef d'entreprise française qui gére seule tous les aspects propres à cette profession, m’a intrigué et donné l’envie d’en savoir plus sur son parcours, ses inspirations, son avenir. C’est ainsi qu’est née l’idée de cette interview, le temps d’un échange passionnant autour d’un petit déjeuner à Saint Germain.


Symine, d’où vient votre passion pour les parfums?

C’est comme si elle avait toujours existé puisqu’elle remonte à l’enfance en fait. Les odeurs, les senteurs m’ont toujours touchée. Dès l’adolescence je me suis tournée vers des parfums assez «femme » tels que La Nuit de Paco Rabanne, Knowing d’Estée Lauder ou encore Paloma Picasso. Pour moi, le parfum est vite devenu un élément réconfortant, comme quelque chose qui permettrait d’exprimer, de déterminer un univers.

Oui , cela rejoint un commentaire de Denyse Beaulieu, sur son blog, Grain de musc, remarquant qu’on reconnaît souvent les perfumistas au fait qu’ils se tournent très tôt vers de grandes références, des parfums qu’on considère à priori comme étant d’un autre âge, et je constate qu’en effet cela se vérifie. Et depuis la naissance de cette passion, quel a été votre parcours , l'évolution qui vous a amenée à lancer votre marque aujourd’hui?


D’origine niçoise, je suis montée à Paris lors de ma maîtrise de Droit que j’ai passée à la Sorbonne, avant d’enchainer sur l’école du Barreau. Une fois mon titre d’avocat en poche, je me suis sentie trop jeune et inexpérimentée pour me lancer dans le métier d’office. En effet, être avocat suppose avant tout de comprendre ses clients, d’être assez armé pour savoir les défendre. Or j’avais encore soif d’apprendre et de vivre avant de me sentir assez mûre et responsable pour exercer.

J’ai donc décidé de me confronter à la vie en voyageant durant quelques années. A mon retour, j’ai eu envie d’exprimer quelque chose qui tiendrait à la fois de l’élégance de la culture française, et de la chaleur que l’on peut trouver au Moyen Orient.


Cette idée m’a vraiment saisie, lorsqu’en retournant dans le sud de la France, j’ai découvert ce lieu magique qu’est Orlamonde, situé entre Nice et Monaco, sur une falaise qui surplombe la mer et qui semble dominer le monde. On pourrait presque y voir que la Terre est ronde. Le temps s’y arrête. Et cette sensation apaisante qui est ma source d’inspiration. Hors Là Monde est donc né de cette envie d’évoquer cet ailleurs, comme l’a d'ailleurs fait, entre autres, Baudelaire (N’importe où hors de ce monde »). C’est comme une sorte d’hommage à ce lieu que de lui donner une nouvelle âme.


D’où la nécessité d’imaginer un symbole, un logo qui soit pertinent afin d’exprimer cette sensation. C’est ainsi que m’est venue l’idée d’une boussole, certes particulièrement significative pour moi qui suis une adepte de sport en mer, mais qui reste avant tout un objet dans lequel chacun peut se retrouver, quelque soit son sexe, son origine ou son âge. Car une boussole permet de savoir où on est mais aussi où l’on va. Cela met l’accent sur la question de l’identité.

J’ai vu sur votre site qu’Hors Là Monde se consacre également aux bijoux. L'envie de créer des parfums vous est-elle venue ensuite?


Non, honnêtement c’était un ensemble, une envie d’exprimer un univers. Or, la création d’un parfum se prête à merveille au message que j’avais envie de faire passer.


A savoir, l’idée de conjuguer l’élégance française à la chaleur que j’ai trouvée au Moyen Orient lorsque j’y ai voyagé. C’était en quelque sorte le pari de tirer le meilleur de chaque influence, aussi bien française qu’orientale, de créer une passerelle entre les deux cultures.


Et ce lien peut s’exprimer à merveille dans un parfum, puisque ce dernier évolue sur la peau, des notes de tête à celles de fond, et qu'on y retrouve généralement plusieurs facettes. Un parfum peut vraiment permettre de dire quelque chose de soi, comme un prolongement de la personnalité en quelque sorte. Cette dualité que j'avais envie de transmettre à travers Shiloh se traduit ici par une ouverture fraiche en tête, (citron, bregamote, note herbacée), un coeur où s'impose la rose de Damas, entourée de cèdre et de notes boisées, autour d'un fond chaud et enveloppant, grâce au patchouli, au santal, à la mousse de chène, au musc et à la vanille.

Et pour évoquer cet univers, vous avez choisi Michel Roudnistka?

En effet, je me suis rendue à Grasse, la ville du parfum par excellence, où se trouvent des sociétés connues pour créer pour des grandes marques (Hermès, Dior) et c’est là que j’ai rencontré Monsieur Roudnistka. Se rendre à Grasse était l’assurance d’un engagement de qualité et d’un choix de belles matières premières.

Avez-vous délibérément choisi de créer d’abord un parfum masculin (Shiloh) et ensuite un féminin (Lady Shiloh) ou ont-ils plutôt vocation à être mixtes? Quelle était votre inspiration?

Il n’était pas question de masculin ni de féminin en fait. Comme je l’ai déjà dit, le but était d’évoquer un univers, de parler à l’instinct des gens, de retranscrire une atmosphère, un lieu, en dehors de toute considération du genre et du sexe, surtout pour le premier, qui peut être porté aussi bien par une femme que par un homme. La création d’un parfum était donc dénuée de toute étude marketing, puisque l’idée était avant tout d’exprimer quelque chose qui me tenait à cœur.


Le deuxième reste également mixte même s’il est un peu plus féminin, car il évoque avant tout la rencontre amoureuse, tout en se voulant également une réflexion sur le temps. Ici le sentiment qui domine la création de Lady Shiloh est celle que « le temps est une illusion », sentiment que l’on retrouve d’ailleurs dans Hors Là Monde. En effet, lorsqu’on est sincère avec soi-même, et avec les autres, et que la vie nous sépare des gens qu'on aime, les émotions, restent, elles, intactes. Et c’est ce qu’est voué à exprimer Lady Shiloh, ce sentiment que lorsqu’on aime quelqu’un, certaines choses comme l’odeur de la peau, précisément, persistent. C’est d’ailleurs bien toute la force du sens olfactif, puisqu’une odeur peut nous faire basculer d’un coup dans un univers, dans une foule de souvenirs.


C'est ce que je souhaitais exprimer à travers ce deuxième parfum. D’où le choix d’une fragrance peut-être plus délicate, moins opulente que le premier. Le fond reste sensuel et enveloppant (patchouli, musc blanc et vétiver) mais moins marqué, tandis que les notes de têtes (bergamote, mandarine) et de coeur (jasmin, violette) apportent plus ici une sensation de douceur et d'intimité.



Et, justement, quel est l’avenir d’Hors Là Monde en ce qui concerne les parfums? Songez-vous à composer un troisième parfum? Un véritable masculin pour le coup?

Un nouveau parfum, oui tout à fait, mais un masculin, non, bien que le nom puisse laisser présager du contraire. Ici, « Monsieur Shiloh » sera en fait un féminin. Pourquoi ce nom pour un parfum dédié aux femmes? Parce que lorsqu’on se fait belle, c’est souvent pour séduire Monsieur et c’est le message à l’origine de ce prochain parfum. La fragrance sera tournée ici autour de l’idée du désir, de la séduction, de conduire l’autre vers soi. C’est comme si le parfum disait « Monsieur, dis moi que je suis la plus belle ». Cette idée m’est venue entre autres d’un proverbe anglais qui dit «Beauty is in the eye of the beholder », (la beauté est dans l’œil de celui qui regarde).

Là où ce parfum fait le lien avec les deux premiers, c’est qu’il ne parle plus d’identité au sens large mais de l’idée d’assoir, d’affirmer son identité: comme s’il disait « dis moi ce que tu sens, je te dirai qui tu es ».

Merci Symine. Et, pour finir, où peut-on retrouver vos parfums?

Pour faire écho à l’univers d’Hors Là Monde, qui peut signifier "par delà les frontières" en un sens, les parfums sont distribués au niveau international, aussi bien en Europe qu’en Russie, qu’aux Etats-Unis, à New York, là où j’ai d’ailleurs vécu et à Los Angles. Ils seront, en outre, bientôt distribués aux Emirats Arabes.

Vous pouvez notamment retrouver Shiloh et Lady Shiloh (dont l'affiche trône d'ailleurs dans l'escalier du café de Flore) en France, à Paris, aux Galeries Lafayette.


Rendez-vous sur le site d'Hors Là Monde pour retrouver tout l'univers de Symine Salimpour.

jeudi 19 novembre 2009

Boucheron femme

Quelques remous dans ma vie professionnelle et personnelle, ces derniers temps, ne m'ont pas laissé le loisir d'écrire comme je l'aurais voulu. Heureusement, les choses semblent se tasser un peu et me voilà plus disponible pour des coups de coeur parfumés, et c'est peu dire qu'il y en a eu ces derniers jours, de Back to Black (By Killian) au Bal Musqué de Nez à Nez, entre autres.

Mais je voulais tout d'abord parler d'un parfum qui existe pourtant depuis plus de 20 ans maintenant mais sur lequel je ne m'étais jamais attardée à l'époque: Boucheron pour femme, le tout premier de la marque.



Il s'agit d'un beau floral oriental comme je les aime, très élégant, pétillant en notes de tête, sensuel en notes de fond, très féminin. Il dégage quelque chose d'ample, de noble et de voluptueux à la fois, dans la tradition des grands parfums classiques, mais tout en étant modernisé par une touche jeune, fraîche et fruitée qui fuse dès son ouverture.

C'est curieux car, d'ordinaire, je n'aime pas trop les notes fruitées dans un parfum. Mais le fait qu'elles soient présentes surtout en tête, mêlées ensuite à un beau bouquet de fleurs, pour s'alanguir enfin dans un lit plus sensuel, plus chaud, oriental, les rend tout à fait charmantes. J'ai d'abord cru déceler de l'osmanthus dès les premiers "pshitts" mais en fait il s'agirait plutôt d'une note abricot, (l'osmanthus évoque souvent ce fruit) conjuguée à la mandarine, à du galbanum et à de la bergamote. On peut y noter également la présence de basilic.

Ce départ se prolonge vite dans un coeur plus dense, riche en belles matières premières florales, qui lui donne cette facette femme, très élégante. Il me semble y percevoir de l'iris, qui lui donnerait cette facette noble et très légèrement poudrée. Mais ce lit de fleurs contribue également à en faire un parfum sensuel, grâce à cette brassée de fleurs blanches, jasmin, ylang ylang, tubéreuse, sans oublier le narcisse et la fleur d'oranger.

Le tout s'arrondit ensuite sur un fond chaud, oriental, composé de santal, d'ambre, de vanille et de fève tonka. L'impression générale en fait un parfum profond, enveloppant, parfaitement équilibré. On ne saurait, en outre, lui reprocher un manque de sillage ou de tenue. En revanche, je le préfère nettement en eau de parfum sur ma peau.

P. S: Juste un petit mot pour dire à tous les passionnés de parfum que je travaille actuellement sur le stand des parfums Memo, à côté de l'Artisan Parfumeur et de Différentes Latitudes. Je me ferais donc un plaisir de discuter avec vous si vous passez par là!